19 octobre 2014

J’ai la rage

Après avoir lu les deux tomes du brûlot du Colonel Abdoulaye Aziz Ndaw et que 4 mois après c’est silence radio, j’ai la rage. Des faits sont dénoncés dans ce livre par un haut gradé de la gendarmerie qui est prêt à apporter  des preuves de ce qu’il avance dans son livre et personne ne bouge le petit doigt sur cette affaire grave de la République : image2

  • Le Président de la République Macky Sall lui même cité dans le livre ne se prononce pas sur le sujet
  • Le procureur (ou soi-disant procureur) passe sur son devoir d’ouvrir une enquête
  • Les personnes impliquées de près ou de loin (Général Fall, Bécaye Diop, Lamine Faye, …) dans les faits dénoncés n’ont fait aucun commentaire sur l’affaire, ne serait-ce que pour démentir. Du côté des personnes citées qui auraient pu appuyer les dires du Colonel Ndaw, c’est silence Radio également.
  • La société civile ainsi que les représentants du peuple (soit-disants députés) ont « blablaté » sur le sujet et sont ensuite passés à autre chose

Et nous le peuple ? A commencer par moi même, toi, lui, elle vous, qu’avons-nous fait ? RIEN! Nous n’avons rien exigé de ceux qui nous représentent à l’assemblée Nationale. Nous n’avons rien exigé de celui qui nous dirige. Nous avons accepté le silence de ceux qui devaient nous éclairer sur cette affaire et nous sommes passés à autre chose. Avec tout ça, on s’étonne toujours que l’affaire de la gendarmerie sénégalaise soit rangée aux oubliettes? J’ai la rage.

Le commissaire Keita a dénoncé des actes de corruption au plus haut niveau de la police nationale et il a été lui même limogé. Qu’avons nous fait,  nous le peuple qui se plaignons de ceux qui nous dirigent ? Rien ! Mais on s’étonne quand même que l’affaire soit rangée aux tiroirs. J’ai la rage.

Le 26 Septembre 2002, le bateau le Joola  a coulé  emportant avec lui plus de 1000 morts. Un drame national au Sénégal. Nous avions tous dit plus jamais ça, nous l’avions répété en cœur. Plus jamais ce laxisme. Laxisme, mot que j’ai découvert lors de cette tragédie car étant sur toutes les lèvres. 12 ans après, nous avons tous oublié ou presque! 12 ans après, le laxisme est toujours là, aujourd’hui plus qu’hier. 12 ans après,  les personnes qui ont survécu à ce naufrage vivent avec un traumatisme non pris en charge jusqu’à présent. A la date d’anniversaire de ce drame, il n y a aucune commémoration digne de ce nom, une commémoration qui ferait que les victimes du Joola resteront à jamais marquées dans l’histoire du Sénégal. Nous ne commémorons pas les événements qui ont marqué notre histoire et quand l’Occident le fait (pour marquer son histoire), nous nous plaignons de ne pas être invités.  La tragédie du Joola doit rester dans l’histoire du Sénégal comme Leopold Sedar Senghor est resté dans l’histoire du Sénégal.  Ce fait historique est aujourd’hui est minimisé, oublié, « le Joola c’est du passé » disent certains. J’ai la rage. images

Le Président Macky Sall ne nous parle pas. Il ne communique pas avec son peuple.  Pour le voir et l’entendre, il faut regarder la RTS, son site internet personnalisé. ll y a tant de dossiers brulants sur la table, des dossiers où on attend que lui et non ses ministres pour nous éclairer, nous rassurer, nous informer. Il n’en est rien. Le président ne parle pas aux médias sénégalais mais il parle aux médias étrangers. Toutes ses grandes sorties médiatiques sont faites à l’étranger. Un manque de respect total envers les journalistes sénégalais (s’il en existe), envers toi, moi, … envers nous nous qui l’avons élu. Et quand je vois que ça dérange peu de monde, j’ai la rage.

Parlons journalisme. S’il y a une profession qui est en mal aujourd’hui au Sénégal, c‘est le journalisme. Nous avons au Sénégal 10 milles sites d’informations en ligne. Et sur chacun de ces sites, on retrouve les mêmes articles, identiques sur le fond et sur la forme (le même titre ou presque, les mêmes photos, les mêmes fautes, la même longueur ou le même nombre de lignes, …). Il n y a aucun travail de fond, d’analyse, de suivi dans la transmission de l’information au public. Si on veut connaître l’historique d’une affaire (gendarmerie, police, enrichissement illicite,…) on ne le retrouve pas facilement sur ces sites. Par ailleurs, les reportages de qualité sur des sujets de fond sont rares voir inexistants. Quand aux enquêtes ou investigations dans le domaine de la politique, on n’en voit pas : une affaire politique explose, ils sautent tous dessus. Deux mois après, ils en parlent plus. Quand je pense qu’ils ont le pouvoir de relever le débat politique au Sénégal et qu’ils ne le font pas, j’ai la rage.

J’ai la rage en voyant Abdoulaye Mactar Diop dans sa nouvelle tenue de Serigne de Dakar. Costumes hier et grands boubous aujourd’hui. Toujours les mêmes dans les hautes sphères et toujours pas de changement dans cette haute sphère.

J’ai la rage quand je vois les mêmes têtes aux instances de décision depuis des decennies : Moustapha Niass, Tanor Dieng, Dansokho, Mbaye Jacque Diop… D’Abdou Diouf à Macky Sall en passant par Abdoulaye Wade, ils sont là. Ils occupent nos ministères, nos assemblées nationales nos partis politiques sans nous apporter du changement. J’ai la rage quand je vois qu’ils ne sont pas prêts à laisser la place à la nouvelle génération.

Nous sommes des milliers de jeunes à avoir la rage des maux qui gangrènent le Sénégal. Une des solutions serait d’être plus exigeant envers nos élus. A titre d’exemple, nous avons élu des députés pour qu’ils nous représentent en contrôlant les lois proposées avant de les voter, en exigeant des ouvertures d’enquêtes si besoin… Vu qu’ils ne le font pas, nous peuple, sortons et exigeons qu’ils le fassent.

Notre exigence nous peuple et la connaissance de nos droits seraient un grand pas vers l’émergence.

— Aminata THIOR

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